Le 18 novembre 2024, la formation plénière de la Chambre sociale de la Cour suprême espagnole a rendu un arrêt (EDJ 2024/733578, STS 5454/2024) qui introduit un changement fondamental dans la réglementation du licenciement disciplinaire en Espagne. Désormais, les employeurs doivent garantir au salarié un entretien avant de procéder au licenciement d’un salarié pour motif disciplinaire, conformément à l’article 7 de la Convention 158 de l’OIT.

Cette décision remet en question la jurisprudence suivie depuis les années 80 par la Cour suprême en Espagne. En effet, étant donné que le salarié a le droit de contester son licenciement, jusqu’à présent la jurisprudence estimait que la loi espagnole offre suffisamment de garanties aux salariés. Désormais, la Cour estime que la Convention 158 de l’OIT, ratifiée par l’Espagne en 1985, est d’application directe et obligatoire pour tous les licenciements disciplinaires.


Que prévoit l’article 7 de la Convention 158 de l’OIT ?

Cet article dispose que : « Un travailleur ne devra pas être licencié pour des motifs liés à sa conduite ou à son travail avant qu’on ne lui ait offert la possibilité de se défendre contre les allégations formulées, à moins que l’on ne puisse pas raisonnablement attendre de l’employeur qu’il lui offre cette possibilité. ».

La Cour suprême espagnole considère que cette disposition est claire, précise et directement exécutoire.


Quel impact pour les entreprises ?

Ce changement jurisprudentiel implique qu’à partir de maintenant, les entreprises doivent obligatoirement offrir un entretien préalable au salarié avant de procéder à un licenciement disciplinaire. Bien qu’aucune procédure formelle spécifique ne soit requise, cette obligation devra être respectée, sauf en cas de circonstances exceptionnelles.

Dans la pratique, cela signifie que :

  • Le salarié doit être informé des motifs du licenciement et avoir l’opportunité de présenter sa version des faits avant que la décision ne soit prise par son employeur.
  • L’entretien préalable ne peut être remplacée par la lettre de licenciement ni par les voies de recours judiciaires ultérieures.
  • Si ce droit à un entretien préalable n’est pas respecté, le licenciement pourra être jugé abusif par les tribunaux.

Conseils aux entreprises en Espagne face à cette nouvelle obligation

Étant donné l’impact de cet arrêt, il est recommandé aux entreprises espagnoles d’adopter de nouveaux protocoles en matière de sanctions disciplinaires :

  1. Introduire une procédure d’entretien préalable avant tout licenciement disciplinaire.
  2. Documenter la tenue de cet entretien, en gardant une trace écrite prouvant que le salarié a bien eu l’opportunité de se défendre.
  3. Former les services RH et les responsables du personnel pour garantir le respect de cette nouvelle exigence légale.
  4. Réviser et adapter les règlements internes et les conventions collectives, afin d’y inclure cette obligation si elle n’y figure pas encore.

Conclusion

L’arrêt du 18 novembre 2024 de la Cour suprême espagnole marque un changement historique dans le licenciement disciplinaire en Espagne, alignant le droit espagnol sur les standards internationaux de l’OIT. Désormais, les entreprises devront accorder au salarié une audition préalable avant de le licencier, renforçant ainsi ses garanties de défense et la sécurité juridique des relations de travail.

Cet arrêt oblige les entreprises et leurs conseillers juridiques à repenser leurs stratégies en matière de licenciement, avec un impact direct sur le contentieux du travail et sur les politiques de gestion des ressources humaines.

 

Héloïse LOPEZ

Abogado ICA Barcelona Col 31 984

hlopez@avocatbarcelone.com

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